Après les paillettes d’Hollywood et l’humour loufoque des frères Coen, la Mostra entre dans le vif de la compétition jeudi, avec un auto-portrait du Japonais Takeshi Kitano en artiste maudit, et une amère méditation sur l’exil, signée par le jeune Allemand Christian Petzold.

Au lendemain de l’ouverture du 65e Festival de cinéma de Venise, l’écrivain et scénariste mexicain Guillermo Arriaga (« Babel », « 21 grammes ») était au Lido avec Charlize Theron qui joue dans « The burning plan », son premier film, ainsi que le cinéaste Barbet Schroeder et Benoît Magimel, pour le thriller « Inju ».

Les deux films seront montrés vendredi.

Deux fictions en lice pour le Lion d’or étaient projetées jeudi.

Dernier volet d’une trilogie sur « l’auto-destruction de l’artiste » parfois jugée très narcissique, « Achilles and the turtoise » (« Achille et la tortue ») fait suite à « Takeshi’s » et « Glory to the filmmaker ».

L’auteur d' »Hana-bi » et de « Sonatine » y dépeint la vie tragique mais aussi drolatique, de Machisu (Matisse en japonais), fils d’un riche industriel collectionneur d’art, dont la vie bascule avec la mort tragique de son père.

Mais les revers du destin n’ébranlent pas le goût de Machisu pour la peinture, une passion dévorante à laquelle il sacrifie tout, en dépit de son incapacité chronique à percer dans le monde de l’art.

Plagiaire de talent, il s’imprègne de tous les styles sans atteindre « l’originalité » exigée par un marchand de tableaux qui, lui, s’enrichit sans vergogne.

Machisu est incarné par Reo Yoshioka enfant, par Beat Takeshi adulte et enfin par Takeshi Kitano, peintre amateur lui-même, dont on voit les toiles.

« A un certain moment, j’avais vraiment envie que mes films aient un succès public, je me demandais comment être un +bon réalisateur+ », a dit Kitano à la presse.

« Aujourd’hui, je suis arrivé à la conclusion que j’ai simplement beaucoup de chance de pouvoir faire ce métier de réalisateur ».

« Au Japon, mes films n’ont pas beaucoup de succès. Ce n’est pas non plus que personne ne vient les voir, sinon j’aurais été contraint d’arrêter le cinéma », a relevé avec humour le cinéaste.

Malgré de bons moments d’auto-dérision, « Achilles and the turtoise » ennuie souvent en multipliant les clichés sur « l’artiste maudit ».

Un autre film, marqué par une amère méditation sur l’exil, était dévoilé.

Tourné dans la région pauvre de Prignitz, dans le nord-est de l’Allemagne, « Jerichow » de Christian Petzold, est un huis-clos entre trois personnages.

Thomas est un jeune Allemand, ex-militaire au brumeux passé qui, à la mort de sa mère, revient vivre dans la modeste maison de son enfance.

Son voisin Ali (Hilmi Sözer) est un émigré turc qui, à force de travail, a réussi à ouvrir une quarantaine de petits snack-bars dont il surveille étroitement l’activité, hanté par la peur d’être volé par ses gérants.

Etrangement triste et silencieuse, sa femme allemande, Laura (Nina Hoss) travaille dur à ses côtés.

Des échanges de regards à la dérobée font naître une complicité entre elle et Thomas (Benno Fürmann), bientôt engagé comme chauffeur par Ali.

Si le climat du film, tout en non-dits et en sentiments étouffés, ainsi que ses enjeux dramatiques sont efficacement posés par Christian Petzold dans la première demi-heure, « Jerichow » patine ensuite, faute d’éléments nouveaux.

Le talentueux jeune cinéaste a aussi tendance à délivrer le sens de son film dans une poignée de dialogues-clés un peu trop explicites.

« Jerichow » est moins original que « Yella », son précédent film au subtil climat mi-onirique, mi-fantastique, en compétition à Berlin, où Petzold mettait en scène une jeune femme (déjà jouée par Hoss) traquée par un amant violent.

AFP

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