Alors que toute l’Asie célébrait dimanche le 65e anniversaire de la capitulation du Japon, qui mit fin à la Seconde guerre mondiale dans la région, le nouveau Premier ministre japonais, rompant avec la tradition, a boycotté la visite au sanctuaire de Yasukuni et présenté ses excuses pour les souffrances causées par son pays à l’époque.
De leur côté, nombre de membres du Parti libéral-démocrate (PLD), aujourd’hui dans l’opposition après avoir dirigé le pays quasiment sans interruption depuis la fin de la guerre, dont l’ex-Premier ministre Shinzo Abe, ont mis un point d’honneur à se rendre au sanctuaire controversé.
Cet impressionnant édifice shintoïste, qui abrite notamment un musée glorifiant les pilotes kamikazes, rend hommage aux 2,5 millions de Japonais morts au combat. Il est objet de polémique dans la région car il honore la mémoire de criminels de guerre condamnés, comme Hideki Tojo, le Premier ministre de l’époque, exécuté en 1948.
En revanche, aucun membre du nouveau gouvernement dirigé par le Parti démocrate (PDJ), arrivé au pouvoir l’année dernière, ne s’est rendu au sanctuaire: c’est la première fois que la totalité d’un gouvernement nippon boycotte la visite à Yasukuni un 15 août, date anniversaire de la capitulation du Japon dans la foulée des bombardements atomiques d’Hiroshima et Nagasaki.
« {Nous avons causé de grands dégâts et de grandes souffrances à de nombreux pays pendant la guerre, notamment aux peuples d’Asie} », a lancé le Premier ministre Naoto Kan devant 6.000 personnes lors d’une autre cérémonie annuelle d’hommage, au stade Budokan de Tokyo{. « Nous ressentons un profond regret, et nous offrons nos condoléances sincères à ceux qui ont souffert et à leurs familles. Nous renouvelons notre promesses de ne jamais déclencher une guerre, nous promettons de faire de notre mieux en faveur de la paix éternelle et de ne plus jamais répéter l’erreur de la guerre ».}
Parmi ceux qui l’écoutaient se trouvait l’empereur Akihito, dont le père Hirohito annonça, il y a 65 ans, la reddition du Japon à la radio: c’était la première fois que les Japonais entendaient la voix de leur empereur, jusqu’alors révéré comme un dieu vivant.
Akihito, qui ne s’est jamais rendu à Yasukuni, a présidé une minute de silence à midi, s’inclinant profondément devant une scène où les familles des morts de la guerre étaient venues déposer des chrysanthèmes jaunes et blancs.
La semaine dernière, le pacifiste Naoto Kan avait déjà présenté des excuses à la Corée du Sud pour la mainmise coloniale japonaise sur la péninsule, de 1910 à 1945.
Du temps de sa suprématie, l’armée du Japon impérial et expansionniste a commis des atrocités dans toute l’Asie, exploitant des centaines de milliers de Coréens comme chair à canon, réduisant les femmes à l’esclavage sexuel comme « femmes de réconfort » dans des bordels de campagne. Sans compter les camps de travail et camps de prisonniers où des milliers de détenus furent exécutés, torturés ou succombèrent aux terribles conditions de vie.
A Séoul, le président sud-coréen Lee Myung-bak, en costume traditionnel, a fêté la libération de la péninsule de la domination japonaise. Il a dit « prendre note de l’effort du Japon, qui représente un pas en avant », et vouloir créer une nouvelle relation avec Tokyo, tout en appelant à ne jamais oublier les leçons de l’histoire et en notant que nombre de dossiers n’étaient pas refermés. Il a également exhorté la Corée du Nord à renoncer aux provocations militaires et au {« changement courageux ».}
En Chine, on s’est souvenu de la guerre sino-japonaise, et de son épisode le plus sanglant, les massacres de Nankin: en 1937, les soldats japonais combattant les forces nationalistes chinoises s’y étaient livrés à des atrocités sur les civils, tuant plusieurs dizaines de milliers de personnes.
En Australie, des vétérans de la Seconde guerre mondiale et des représentants de la Nouvelle-Zélande, des Etats-Unis et de plusieurs pays d’Asie ont également participé à une cérémonie de commémoration à Sydney. Près de 27.000 soldats australiens furent tués au combat ou succombèrent dans les camps japonais pendant le conflit.
[Source : La presse canadienne->