Ses études le destinaient au métier d’avocat à Tokyo, mais sa passion pour la cuisine française a été plus forte: au piano du restaurant Le Bec, célèbre établissement étoilé lyonnais, le Japonais Taka revisite la gastronomie française, à l’instar de nombreux chefs étrangers.
Durant ses études de droit à Tokyo, Takao Takano se prend de passion pour la cuisine en mijotant des petits plats pour ses amis.
« Quand on parlait de cuisine, dans ma tête c’était la cuisine française », explique Takao Takano, dit Taka, qui voue de l’admiration au célèbre chef japonais Kiyomi Mikuni, lui-même formé chez Alain Chapel et Troisgros.
« J’ai acheté ses livres de cuisine et imité son poulet braisé », raconte ce chef de 35 ans à l’allure juvénile.
En 1999, il entre comme commis au restaurant La Butte Boisée à Tokyo où le chef Morishige, formé chez Taillevent et Marc Veyrat, lui inculque le « respect du produit » et de la « cuisine de saison ».
Il restera deux ans et demi. « Je rêvais de venir en France », confie Taka, qui se dit fasciné par la culture française, « Gainsbourg », même s’il « ne parle pas du tout français ».
« Je lui ai dit +je veux travailler », les seuls mots que je savais en français », raconte Taka, aussitôt engagé comme commis de cuisine.
« Au début, il y avait beaucoup de choses que je ne comprenais pas, mais j’observais tout le temps », glisse-t-il, malicieux.
Fin 2003, il suit son mentor qui ouvre son propre restaurant dans la presqu’île. Il y gagnera ses galons. Et rencontre sa future femme, Yuko, une Japonaise chef pâtissière.
Et lorsque Le Bec lui propose en avril 2010 de reprendre les rênes de son restaurant doublement étoilé, il n’hésite pas : « C’est ici que j’ai tout appris, j’y ai tout donné, c’est comme ma maison », s’enthousiasme Taka, parti à l’assaut d’une troisième étoile avant ses 40 ans.
« Le Bec m’a demandé d’ajouter ma touche personnelle et ma culture » à la carte, souligne-t-il. Ce sera une « façon différente de traiter le produit ». Comme le canard, auquel il mêle à la sauce la saveur du « poireau grillé » pour la « japoniser ».
« Je rajoute de petites touches », précise-t-il, comme « de la sauce soja et du saké » pour « laquer » un cabillaud.
Il mise aussi sur des « plats nouveaux »: un « Saint-Pierre poché dans une infusion japonaise d’agrumes », accompagné d’une « sauce soja saké au goût de bonite séchée ».
Ce passionné de gibier aime cuisiner une « soupe royale » à base de colvert, perdreau et autre pigeonneau, « un plat où on peut sentir les saisons et le terroir français ».
« Au Japon, je travaillais beaucoup le gibier, mais je suis surpris par la variété qu’on trouve en France », s’émerveille celui qui trouvent « magiques » les cocottes en fonte mais « n’imaginerait pas cuisiner sans ses couteaux japonais ».
Avec une brigade cosmopolite de cinq personnes en cuisine, il « faut être polyvalent », assure ce chef « perfectionniste », qui sert environ 70 couverts cinq jours par semaine.
Ses points faibles ? « Je ne sais pas déléguer, reconnaît-il, avouant être parfois « emporté » et « manquer de patience ».
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