Au moins trois lutteurs de sumo ont reconnu pour la première fois avoir truqué des combats, a déclaré jeudi le gouvernement japonais, en condamnant cette « trahison » à l’égard du sport ancestral nippon éclaboussé par un nouveau scandale.
Des soupçons de trucage planent depuis longtemps sur cette discipline née il y a plus de 1.500 ans et dont l’origine est liée à la religion shintoïste, mais aucun sumotori, nom donné aux lutteurs, n’avait jusqu’ici reconnu se livrer à ce genre de pratique.
Le ministre de l’Education et des Sports, Yoshiaki Takaki, a dit jeudi devant une commission parlementaire que son ministère avait été informé des aveux par le président de l’Association japonaise de sumo (AJS).
L’affaire a été révélée après la découverte par la police de messages sur des téléphones portables d’une douzaine de lutteurs laissant entendre que des combats avaient été arrangés.
« S’il y a réellement eu des combats truqués, il s’agirait d’un acte grave de trahison à l’égard du peuple japonais », a déclaré le Premier ministre Naoto Kan devant le Parlement, en réclamant que toute la lumière soit faite.
En 2000, un lutteur à la retraite, Keisuke Itai, avait affirmé avoir rencontré et même participé à ces pratiques au cours de sa carrière entre 1978 et 1991. Mais l’Association de sumo avait balayé ses allégations d’un revers de main et aucun sumotori en exercice n’avait jusqu’à aujourd’hui corroboré ces accusations.
Le sumo, réservé exclusivement aux hommes, observe des rites quasi religieux, avec sa gestuelle, ses codes vestimentaires ou le jet symbolique d’une poignée de sel par chacun des lutteurs afin de purifier le ring avant le combat.
Mais au cours des dernières années, les Japonais ont découvert avec effarement que derrière la façade respectable du sport national nippon se cache un monde trouble, où la violence est apparemment monnaie courante et où l’argent sale circule en quantité.
Après plusieurs affaires de drogue, d’extorsion de fonds et le décès en 2007 d’un jeune apprenti passé à tabac par ses aînés, prétendument pour l’endurcir, le sumo a été l’an dernier au centre d’une enquête sur des jeux clandestins organisés par la pègre nippone.
Seuls les paris sur les courses de chevaux et certains sports mécaniques sont autorisés au Japon.
Au moins 27 lutteurs et entraîneurs ont reconnu participer à des jeux clandestins sur le base-ball et l’un des plus célèbres sumotori, Kotomitsuki, 34 ans, ainsi que son maître d’écurie, Otake, 42 ans, ont été bannis à vie par l’Association.
C’est au détour de cette vaste enquête que la police de Tokyo a saisi les téléphones portables des lutteurs.
Les messages échangés entre les sumotori évoquent des défaites arrangées contre des sommes de l’ordre de quelques milliers d’euros, selon la presse.
La plupart des 14 lutteurs suspectés d’avoir triché appartiennent à la catégorie « juryo », le premier niveau dans la hiérarchie du sumo pour commencer à toucher un salaire. Payés environ un million de yens par mois (9.000 euros), ils avaient probablement mis sur un pied ce système « d’aide mutuelle » leur permettant de s’adjuger des victoires à tour de rôle afin de ne pas être relégués au niveau inférieur, a commenté le journal Yomiuri.
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