Plusieurs banques d’Asie, notamment japonaises, s’attendent à perdre de l’argent à cause du dépôt de bilan de Lehman Brothers, mais les plus gros dégâts pour la région seront causés par le recul attendu des exportations asiatiques vers les Etats-Unis, avertissent les analystes.
En se mettant sous la protection de la loi américaine sur les faillites, Lehman Brothers a fait savoir que ses deux principaux créanciers étaient des banques japonaises, Aozora Bank et Mizuho Corporate Bank, à qui elle doit respectivement 463 millions et 289 millions de dollars.
Les actions des deux banques ont plongé mardi à la Bourse de Tokyo. Mizuho Financial Group a terminé la séance en baisse de 10,68% et Aozora de 15,76%, même si cette dernière a affirmé que son exposition réelle était de seulement 25 millions de dollars grâce à des « mesures de gestion des risques ».
Une autre grande banque japonaise, Sumitomo Mitsui Financial Group, a avoué s’attendre à perdre 10 milliards de yens (67 millions d’euros) dans la débandade de Lehman Brothers. Le dépôt de bilan de la seule filiale nippone de la banque d’affaires américaine est le deuxième plus important enregistré au Japon depuis 1945, derrière l’effondrement de Kyoei Life Insurance en 2000.
Selon Masamichi Asachi, économiste chez JP Morgan Securities, les dégâts pour les banques japonaises apparaissent cependant limités. « Elles ont échappé au pire, à savoir un choc direct provenant de l’affaire Lehman », a-t-il estimé.
Mais « chaque pays est lié au système financier américain », rappelle-t-il, et « le Japon ne peut en aucune façon échapper à des dégâts pour son économie réelle. La question est de savoir à quel point, et pendant combien de temps ».
En Corée du Sud, les institutions financières locales ont investi un total d’environ 720 millions de dollars dans Lehman Brothers, a indiqué la Commission des services financiers sud-coréenne, qui estime toutefois que cette exposition « aura un impact limité sur leur santé financière ». En Australie, la grande banque d’affaires Macquarie a assuré que son exposition à la quasi-faillite de Lehman était négligeable.
Mais la retentissante défaillance de Lehman Brothers laissera des cicatrices sur l’économie régionale, surtout dans les pays qui dépendent fortement des exportations vers les Etats-Unis, préviennent les économistes.
« Il ne fait aucun doute que nous allons assister à des incertitudes financières significatives à l’échelle mondiale », juge Mitsumaru Kumagai, économiste au Daiwa Research Institute. Selon lui, « la situation affectera l’emploi aux Etats-Unis et refroidira les appétits des consommateurs ».
La crise actuelle « va inévitablement faire diminuer davantage la demande de produits japonais aux Etats-Unis et cela affectera l’économie japonaise dans son ensemble », a prévenu mardi le ministre japonais de la Politique économique et budgétaire et candidat au poste de Premier ministre, Kaoru Yosano.
Le secrétaire aux Finances de Hong Kong, John Tsang, a quant à lui assuré que les institutions financières du territoire étaient en bonne santé. « Nous disposons d’un régime de régulation complet, donc je ne suis pas trop inquiet », a-t-il déclaré. Certains analystes étaient toutefois moins optimistes.
« Les chances pour que d’autres banques et entreprises américaines chutent à leur tour sont élevées », a estimé Zachariah Au, vendeur d’actions chez Prudential Brokerage à Hong Kong.
Selon lui, « la situation devrait affecter sérieusement Hong Kong et le marché de Chine continentale car les Etats-Unis sont notre plus grand investisseur. Je conseille désormais à mes clients de conserver ce qu’ils ont et de ne plus rien acheter ».
Par Hiroshi HIYAMA
AFP