Pays du Nord et du Sud ont adopté vendredi à Nagoya, au Japon, un accord sans précédent visant à protéger les espèces et les écosystèmes de la planète et à en partager plus équitablement les bénéfices.
Dix mois après l’immense déception du sommet de Copenhague sur le réchauffement climatique, la réussite de la conférence de Nagoya devrait, au-delà des dispositions parfois très techniques qu’elle comporte, redonner des couleurs au processus de négociation onusien sur l’environnement.
La secrétaire d’Etat française à l’Ecologie, Chantal Jouanno, a salué « un accord historique, un très grand moment ».
Les représentants de plus de 190 pays, à l’exception notable des Etats-Unis qui n’ont jamais ratifié la Convention sur la diversité biologique (CBD) lancée en 1992 lors du sommet de la Terre à Rio, ont adopté un « plan stratégique » en 20 points pour 2020 visant à freiner le rythme alarmant de disparition des espèces.
Ils se sont également mis d’accord sur un protocole contraignant sur le partage des bénéfices tirés par les industries de la pharmacie et des cosmétiques des ressources génétiques des pays du Sud (animaux, plantes, micro-organismes).
L’issue des discussions sur ce protocole ABS (accès et partage des avantages) était cruciale dans la mesure où nombre de pays en développement – qui le réclamaient à cor et à cri depuis plusieurs années – avaient clairement indiqué que le sort des autres décisions en dépendait.
Le Brésil, qui abrite la plus grande partie de l’immense bassin amazonien, où vit 10% de la totalité des espèces connues de la planète, avait insisté sur la nécessité d’arriver à un accord sur un partage équitable des ressources.
« Le protocole de Nagoya est une réussite historique », a estimé Jim Leape, directeur général de WWF International.
Le plan stratégique 2020 fixe comme objectif une augmentation sensible des aires protégées de la planète. Elles représentent actuellement 13% de la surface totale des terres et un peu moins de 1% de la surface totale des océans: un compromis a été trouvé pour un objectif 2020 de 17% pour les terres et 10% pour les mers.
Ce plan, qui n’a pas de caractère légalement contraignant, peut-il avoir un réel impact pour la protection des espèces à travers le monde?
« Oui », répond Russell Mittermeier, président de l’ONG américaine Conservation International. « Les aires protégées, quelle que soit leur nature, sont le meilleur outil dont nous disposons à ce jour pour protéger la diversité du vivant », a-t-il expliqué à l’AFP. « Même si ce n’est pas une décision légalement contraignante, le message envoyé à tous les pays est +il faut faire plus+ ».
Plusieurs engagements laissent cependant la porte ouverte à de nombreuses interprétations. Ainsi, l’un des objectifs prône l' »élimination », ou au moins la « réduction progression » des « subventions néfastes » pour la diversité biologique. Des questions demeurent sur son influence concrète sur les innombrables subventions à la pêche, en Europe en particulier, alors que la surpêche de nombreuses espèces est scientifiquement documentée.
« 70 à 80% des espèces de poissons que nous mangeons » sont pêchées au-delà de leur capacité de reproduction, rappelait l’acteur américain Harrison Ford dans un entretien à l’AFP en début de semaine.
La prochaine « conférence des parties » de la CBD aura lieu dans deux ans, à New Delhi, en Inde.
Source: [AFP->