Frédérique Jossinet attend ce rendez-vous depuis trop longtemps. A 32 ans, la doyenne de l’équipe de France de judo qui fait office de favorite en moins de 48 kilos jure que, cette fois, elle ne se contentera pas d’une médaille d’argent, la seule du judo français à Athènes. Jamais elle n’a réussi à monter sur la plus haute marche du podium en compétition internationale individuelle.
Frustration. Avec deux médailles d’argent aux championnats du monde en 2005 et 2003, une autre aux championnats d’Europe à Lisbonne cette année, et une troisième place aux Mondiaux de Rio l’an dernier, son palmarès est bien fourni. Mais chaque fois, la Parisienne rentre frustrée. Cette frustration se nomme trop souvent Ryoko Tamura-Tani, la Japonaise septuple championne du monde qui l’a battue au Jeux d’Athènes en 2004 et aux Mondiaux d’Osaka en 2003.
Samedi, au Palais des sports de Shoutiyuan, la petite blonde électrique aura donc une sérieuse revanche à prendre. Soutenue par Cécile Nowak, la seule Française à avoir fait tomber la double championne olympique nippone – à Barcelone, en 1992 -, Jossinet veut enfin battre «Yawara-chan» (littéralement doux-souple), le surnom que l’icône tient d’un héros de manga sur le judo. «Bien sûr que Tani est battable, affirme Jossinet, récemment diplômée de l’Essec, grande école de commerce. Elle a perdu il y a deux mois contre Emi Yamagashi, une jeune Japonaise. Aux derniers Mondiaux à Rio, tout le monde s’est rendu compte qu’elle était à ma portée.» Au Brésil, elle avait failli faire vaciller cette montagne du judo. Même si elle n’a jamais pu placer le mouvement capable de la faire basculer. «Elle a l’appui des arbitres. Je vais donc partir du principe que l’arbitrage ne me sera pas favorable. Il ne faut pas que j’attende qu’elle soit sanctionnée. Mais si je la fais tomber, elle tombera.»
Mûri. Sa première rencontre avec Tani, c’était à Chiba, lors des championnats du monde en 1995. Jossinet n’avait que 18 ans. Aujourd’hui, elle a beaucoup mûri. L’arrivée dans le staff de Cathy Fleury, une bagarreuse de premier plan, lui a aussi permis de passer un cap. La consigne est claire : ne rien lâcher. Comme le confirme Brigitte Deydier, ancienne championne du monde, directrice technique nationale et témoin de l’évolution de l’athlète. «Frédérique est plus complète sur le plan judo. Maintenant, sur un combat, ça se joue à une opportunité. Et il n’y a pas que Tani qui peut la gêner. En fait, toutes les filles qui ont un judo très bas. Mais elle a travaillé pour garder le rythme dans l’attaque. Grâce à cela, elle peut s’imposer tactiquement.» Reste à ne pas se focaliser sur Tani. La Japonaise était absente pour maternité aux Mondiaux du Caire en 2005, et Jossinet avait aussi chuté en finale, face à la Cubaine Yanet Bermoy. Ce que la Parisienne rappelle sans cesse. Pour décrocher enfin sa médaille d’or.
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