L’économie japonaise a rechuté au deuxième trimestre, une fois de plus
CONJONCTURE. La Banque du Japon n’est pas pressée de poursuivre la normalisation de sa politique monétaire.
Angélique Mounier-Kuhn
Alors que s’est ouverte lundi une nouvelle cession parlementaire qui s’annonce des plus périlleuses pour le premier ministre Shinzo Abe, au comble de l’impopularité, le Japon a appris qu’il avait, une fois encore, flirté avec la récession. Entre avril et juin, l’économie s’est contractée de 1,2% en rythme trimestriel annualisé, contre une hausse de 0,5% annoncée en première estimation. La croissance a notamment pâti d’un tassement de 1,2% de l’investissement des entreprises que ne sont pas parvenues à compenser de chétives dépenses des consommateurs (+ 0,3%). « Il convient de relativiser, souligne Daniel Felder, consultant indépendant. Au premier trimestre (année civile), la croissance avait été très forte, et si on lisse sur l’ensemble du premier semestre, elle a atteint 2,5%, un rythme supérieur à celui projeté par le gouvernement. »
Pour autant, le trou d’air du deuxième trimestre achève d’éloigner les perspectives d’une poursuite de la normalisation de sa politique par la Banque du Japon à brève échéance. A l’unanimité, les observateurs estiment qu’elle maintiendra inchangé son principal taux directeur à 0,5%, niveau auquel elle l’a arrimé en février, lors de sa réunion des18 et 19 septembre.
La BOJ sera d’autant plus encline au statu quo que les répercussions économiques de la crise du crédit partie des Etats-Unis restent imprévisibles. En outre, l’Archipel est toujours la proie de pressions déflationnistes. L’indice des prix à la consommation – hors éléments volatils – s’est affiché à -0,5% sur un an en juillet, et les salaires mensuels versés par les entreprises de plus de cinq employés sont en repli continuel depuis huit mois (-2,7% sur un an), note Sophie Mametz, de Natixis.
Pour noircir un peu plus le tableau, Kabuto Cho a connu cet été une correction plus sévère que les autres grandes bourses de la planète. Le Nikkei a flanché de 13,7% depuis le 7 juillet. « 30% du marché japonais est dominé par des investisseurs étrangers qui ont eu besoin de liquidités et se sont délestés de leurs actions dans d’énormes volumes. C’est la grande faiblesse du Japon : il ne contrôle pas sa propre bourse », explique Paul Kempf, de la société de gestion MWD. Le mois passé, les non-résidents ont été vendeurs nets de plus de plus de 1000 milliards de yens de titres nippons, du jamais vu depuis le funeste mois d’octobre 1987.
Pourtant, « avec des ratios prix sur bénéfice de 14, les actions japonaises n’ont jamais été aussi bon marché », poursuit Paul Kempf. Et l’institut Daiwa vient tout juste de rehausser de +7,8% à +9,9% ses prévisions de bénéfice pour les 300 plus grosses sociétés japonaises en année fiscale 2007. Dès que le Nikkei se rapprochera de 15200 yens, il sera grand temps de partir à la chasse aux bonnes affaires, conclut le spécialiste.
Source : Letemps.ch