Après le homard géant de Jeff Koons en 2008, le Château de Versailles accueille les étranges bouddhas de l’artiste japonais Takashi Murakami, ses compositions de fleurs aux couleurs acidulées et ses drôles de petits monstres impertinents et parfois inquiétants.
L’exposition, qui sera ouverte au public du 14 septembre au 12 décembre, présente vingt-deux oeuvres, principalement des sculptures, disposées dans les appartements royaux et le jardin. La moitié d’entre elles n’ont encore jamais été montrées.
« Je suis plutôt content du résultat », indique à l’AFP Takashi Murakami, alors que les préparatifs d’installation touchent à leur fin.
En revanche, la perspective du vernissage officiel dimanche soir le rend « nerveux », confie-t-il. Contrairement à son hôte Louis XIV, l’artiste n’apprécie pas trop ces festivités.
Pour Versailles, Murakami a voulu être comme le mystérieux chat du Cheshire dans « Alice au pays des merveilles », qui apparaît, puis disparaît pour n’être plus finalement qu’un grand sourire.
« Pour nous, Japonais, le château de Versailles est tellement différent de notre culture. J’ai voulu créer l’effet inverse pour que les Occidentaux ressentent un dépaysement », explique-t-il, les yeux mi-clos.
Il y a ce bouddha ovale, en bronze doré à la feuille, haut de plus de cinq mètres, qui domine la perspective des jardins de Le Nôtre. D’un côté, il offre un visage méditatif avec une barbichette comme celle de l’artiste. De l’autre, un visage peu engageant avec des dents de requin.
« Oval Buddha Silver », son pendant en argent, plus petit, a trouvé son écrin dans le salon d’Abondance.
Les fleurs, chères à l’artiste, donnent un air de gaieté au château avec leurs couleurs vives et leur large sourire. Dans la Galerie des Glaces, « Flower Matango », haut de 3 mètres, est une sorte de monstre floral.
Directement inspirée des mangas, la blonde « Miss Ko », en mini-jupe et petit tablier de serveuse, s’est installée dans le Salon de la Guerre. Au Japon, elle est devenue le symbole d’une chaîne de restauration rapide.
Dans la salle du Sacre, un petit empereur avec une barbichette et une couronne ridicule sur la tête, donne à réfléchir sur le pouvoir.
Takashi Murakami a le sens de la caricature. « Pom and me » (2009) est un autoportrait de lui même avec son chien. « Il représente l’artiste, qui dans la tradition japonaise est très bas dans l’échelle sociale », explique Murakami.
Jean-Jacques Aillagon, le président de l’établissement public, s’est dit « très convaincu par la pertinence de la cohabitation des oeuvres » de Murakami et du Château de Versailles. « La rencontre se passe très bien. Elle est très tonique », estime-t-il.
Le coût de l’exposition se monte à 2,5 millions d’euros, essentiellement financé par le Qatar.
L’exposition Murakami a déclenché des protestations chez certains traditionalistes qui la jugent déplacée dans les appartements royaux. Une pétition sur internet intitulée « Versailles mon amour » a notamment recueilli 4.300 signatures depuis fin juin.
Les opposants appellent à manifester le 14 septembre à 18H00 devant les grilles du château. Ils invitent les protestataires à venir avec des « oeuvres d’art » de leur confection, genre « urinoir ou bidet posés dans une poussette de supermarché ».
« Je respecte » les diverses positions exprimées, a indiqué Takashi Muramaki, interrogé sur ces critiques. « C’est O.K., tant qu’un extrémiste ne m’attaque pas physiquement », a-t-il ajouté en souriant.
Source: [AFP->