La saison des résultats bat son plein et les grands noms nippons de l’industrie engrangent des bénéfices, mais cela se fait au prix de restrictions et restructurations pour lutter contre la flambée du yen.
Du fait de l’amélioration conjoncturelle et des changements qu’il s’impose, le fleuron de l’électronique, Sony, a certes dégagé plus de profits qu’un an plus tôt au terme des neuf premiers mois de son exercice, mais la cherté de la devise nippone lui coûte.
Durant les seuls trois mois d’octobre à décembre 2010, les recettes du géant, qui réalise 80% de ses ventes hors du Japon, ont décliné de 1,4% sur un an.
La raison? Une ascension concomitante de 8,7% du yen face au dollar et de 18,5% vis-à-vis de l’euro, a assuré Sony. Et d’ajouter: « calculées en devises locales, nos ventes trimestrielles ont augmenté de 6% ».
Idem pour Canon. Bien qu’ayant presque doublé ses profits annuels en 2010, Canon aurait fait mieux si le yen n’avait pas atteint ces derniers mois son niveau le plus élevé en quinze ans face au dollar et en neuf ans vis-à-vis de l’euro.
« Nous sommes parvenus à réduire les coûts comme jamais », se félicitait lors de la présentation des résultats Toshizo Tanaka, un directeur général adjoint de Canon.
A l’instar de Sony et Canon, d’autres grands groupes exportateurs, tel le constructeur d’automobiles Honda, subissent les caprices monétaires consécutifs aux hésitations de la reprise aux Etats-Unis et aux difficultés financières de pays européens.
A cause du renchérissement brutal du yen, leurs revenus encaissés dans des devises étrangères sont en effet mécaniquement amoindris, même si l’amélioration conjoncturelle internationale et la nouvelle clientèle des pays émergents ont permis à la plupart des sociétés de compenser tout ou partie des répercussions négatives de ces violentes fluctuations monétaires.
Pour conserver leurs marges et lutter durablement à l’échelle internationale face à des concurrents étrangers aidés par des monnaies plus faibles, les firmes nippones sont néanmoins forcées de revoir leur mode de production ou de gestion et de sacrifier des branches.
Elles s’activent pour produire plus à proximité des zones de vente, s’approvisionner davantage sur place auprès de fournisseurs moins chers, sous-traiter plus de production, minimiser les frais de main-d’oeuvre au Japon ou encore céder des activités non centrales.
Sony a supprimé des milliers de postes, fermé des usines et bousculé sa façon de travailler.
« Nous nous en sortons en améliorant notre productivité », expliquait pour sa part M. Tanaka de Canon, rappelant que le groupe accélère l’automatisation des sites de production pour pouvoir en conserver au Japon.
Toshiba, entreprise extrêmement éclectique, est obligée de faire des choix.
Outre la cession de la division des téléphones portables, elle va faire fabriquer des circuits intégrés par des prestataires extérieurs, dont son concurrent Samsung Electronics, afin de concentrer ses moyens sur les stratégiques puces-mémoires flash NAND qu’elle veut produire dans l’archipel.
Fujitsu a abandonné ses disques durs, Sanyo s’est réfugié sous la coupe de Panasonic, Epson a transféré ses écrans à Sony, etc.
Par ailleurs, pour des entreprises sans usine, comme le géant du jeu Nintendo, la méthode de fixation des prix et des clauses contractuelles est aussi mise à mal.
« Tant que les fluctuations sont modérées, il est de la responsabilité des dirigeants d’y faire face, mais la rapidité qui a été atteinte ces derniers temps a dépassé nos capacités », a reconnu le patron de Nintendo, Satoru Iwata, société qui a durement subi le renchérissement du yen.
« Outre ces mouvements sur le marché des changes, les entreprises vont aussi devoir lutter contre l’augmentation attendue des tarifs des matières premières du fait du dynamisme économique des pays émergents, et répondre aux revendications salariales des ouvriers locaux », préviennent les analystes de Nikko Cordial.
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