Shinzô Abe est depuis sa très controversée visite au sanctuaire Yasukuni la cible de critiques venant de dirigeants du monde entier. Cependant au Japon, ce n’est pas avec ses actions diplomatiques qu’il assurera la pérennité de son parti, mais avec sa politique économique.
Le Parti libéral-démocrate (PLD) avec sa très confortable majorité aux deux chambres de la Diète devait s’assurer trois ans de gouvernance sans accroc, cependant, l’année 2014 risque de connaître plus de turbulences que prévu selon des experts. Tout d’abord sur le plan diplomatique, où les tensions entre le Japon et ses voisins coréens et chinois sont montées d’un cran depuis que le Premier ministre a décidé de visiter le 26 décembre 2013 le sanctuaire de Yasukuni. Ce sanctuaire a été construit en 1869 par l’empereur Meiji pour glorifier les soldats japonais « morts pour l’empereur et la patrie ». Là où le bât blesse, c’est que depuis, parmi ces « âmes héroïques » se trouvent les noms de plusieurs criminels de guerre dont 14 de classe A, condamnés après la seconde guerre mondiale par un tribunal international. C’est pourquoi la visite de Shinzô Abe au Yasukuni est vue comme une véritable provocation par la Chine et la Corée du Sud. Un avis qui est partagé par les États-Unis et d’autres pays d’Asie, Washington s’est dit « déçu » par cette initiative de M. Abe, et a demandé à ce que le Japon fasse son possible pour apaiser la situation. Le Premier ministre lors de son intervention à l’occasion de la nouvelle année, s’est dit ouvert à toute discussion et a exprimé son désir de s’expliquer sur ce problème avec ses voisins dont la Chine et la Corée du Sud, chose qui ne risque pas d’arriver de sitôt.
Malgré cette situation diplomatique assez tendue, le véritable combat du gouvernement Abe pour se maintenir au pouvoir va surtout se jouer sur plan économique selon l’éditorialiste Ayako Mie du Japan Times. D’après elle, si Shinzô Abe a appris une chose depuis son mandat désastreux entre 2006 et 2007, c’est que « l’économie est la principale préoccupation des électeurs, et non ses ambitions nationalistes comme réviser la Constitution » (référence à l’article 9 de la Constitution japonaise et son refus à la guerre). Un combat qu’il doit remporter et qui peut s’annoncer compliqué à cause de l’augmentation de la taxe sur la consommation de 5% à 8% à partir d’avril. Car la bonne santé économique du Japon est sa principale arme pour regagner la confiance de ses concitoyens, la loi sur « les secrets d’État » (voir l’article) ayant joué un rôle important sur sa baisse de popularité. Pour pallier à cette hausse du coût de la vie, le Premier ministre a demandé aux entreprises de faire un effort et d’augmenter les salaires de leurs employés. M. Abe a déclaré en décembre : « L’économie reste notre priorité, et l’Abenomics (la politique économique du gouvernement Abe) serait considérée comme un échec si les importants profits engrangés par les grandes entreprises n’étaient pas redistribués aux petites et moyennes entreprises sous forme d’augmentation de salaire ».
Pour finir, la démission de Naoki Inose, ex-gouverneur de Tôkyô suite à un scandale financier (voir l’article), annonce l’élection d’un nouveau gouverneur prévue pour février. Cet événement politique sera majeur dans l’agenda du PLD qui devra choisir un candidat capable de gagner ce poste stratégique. Car avec les Jeux Olympiques de 2020, avoir dans son camp le gouverneur de Tôkyô aura beaucoup d’influence sur le processus organisationnel.