Je continue aujourd’hui la série sur les expressions idiomatiques utilisant des parties du corps. Après le ventre, nous allons aujourd’hui nous intéresser au cou, 首, dont les deux principales prononciations sont シュ (on-yomi) et くび (kun-yomi).
En japonais, くび désigne non seulement le cou, mais aussi, par extension, la tête, y compris au sens figuré de « chef », « principal », comme dans 首相 (しゅしょう), premier ministre, ou 首都 (しゅと), capitale. 首 a également un autre sens que nous allons découvrir avec la première expression du jour.
Perdre ou garder sa tête
La première expression sera 首になる : littéralement « devenir » un cou. Pour devenir un cou, il faut faire sauter la tête. Si ce sens littéral existe, l’expression sert généralement à évoquer une violence plus symbolique mais très fréquente dans nos pays aux économies sinistrées, celle d’être viré de son travail. C’est là le second sens de くび, que vous avez peut-être déjà lu/entendu : まさか…おまえは…くび ? C’est pas vrai, tu t’es fait viré ? Dans une langue plus formelle, on retrouve l’expression entière : まさか… もりさんはくびになりましたか ? Ce n’est pas possible, M.Mori a été licencié ?
Il existe des expressions tout aussi imagées qui signifient exactement la même chose : 首が飛ぶ (くびがとぶ、litt. le cou/la tête vole), 首を切る (litt. couper la tête), ou 首にする (idem). À l’inverse 首が繋がる(くびがつながる, litt. le cou/la tête est reliée) signifie conserver son poste (un peu l’équivalent de « sauver sa tête »). Au travail, il est donc important d’avoir toute sa tête.
Une autre façon de perdre la tête, c’est de crouler sous les dettes. Mais ici, il n’est plus question de décapitation. En japonais, les dettes donnent plutôt le torticolis puisqu’on emploie l’expression : 首が回らない(くびがまわらない, litt. le cou ne tourne pas). Le poids des dettes pèse si lourd sur les épaules que la tête est bloquée… à moins qu’on n’ose tout simplement plus regarder les débiteurs qui viennent de tous côtés. Ex : 借金で首が回らない (しゃっきんでくびがまわらない)je croule sous les dettes (je ne sais plus où donner de la tête).
Approuver / désapprouver
En japonais aussi, les mouvements de la tête peuvent servir à marquer l’approbation ou la désapprobation. Mais là où on pourrait attendre 頭 (あたま、tête), on retrouve 首. 首を縦に振る(くびをたてにふる), remuer la tête/le cou verticalement, c’est « approuver » tandis que 首を横に振る (くびをよこにふる), remuer la tête horizontalement, c’est « désapprouver ». Pour exprimer le doute, on tord (ou plutôt penche) le cou : 首をひねる。Des hochements somme toute assez similaires aux nôtres.
S’impliquer
On retrouve également le cou dans plusieurs expressions exprimant l’implication dans l’action ou autre. 首を突っ込む(くびをつっこむ), litt. « plonger le cou ». Cette expression peut souligner de manière positive le fait de se donner à fond, mais peut aussi avoir une connotation négative, « se mêler des affaires des autres ».
Lorsqu’on est impliqué dans la réussite d’un projet et qu’on est déterminé à aller au bout quel qu’en soit le prix, on met son cou en jeu : 首を賭ける(くびをかける). Et bien sûr, lorsqu’on s’engage à ce point, on est impatient de connaître le résultat de ses efforts. Attendre impatiemment, en japonais, c’est « allonger le cou » : 首を長くして待つ(くびをながくしてまつ)。
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Voilà, c’est tout pour aujourd’hui. J’espère que vous garderez la tête sur les épaules jusqu’à la prochaine fois. それでは、また、お楽しみに。