Le 6 janvier, la Corée du Nord a réalisé un nouvel essai nucléaire. L’évènement a suscité l’indignation au Japon, notamment dans la localité de Hiroshima.

Le musée du Mémorial de la Paix de Hiroshima (© Wiiii)
Le musée du Mémorial de la Paix de Hiroshima (© Wiiii)

L’annonce du succès de l’essai d’une bombe nucléaire à hydrogène fait suite à l’enregistrement d’une secousse sismique d’origine humaine d’une magnitude de 4,8.

Les bombes à hydrogène sont les plus puissants explosifs créés par l’être humain. Elles sont de plusieurs centaines à plusieurs milliers de fois plus destructrices que Little Boy et Fat Man, les bombes que les États-Unis ont lâchées sur Hiroshima et Nagasaki en août 1945.

Ces dernières étaient des bombes à fission nucléaire, une technologie qui permet de générer une formidable quantité d’énergie par la division d’un atome dit « lourd » tel que le plutonium (technologie de la bombe Fat Man) ou l’uranium (bombe Little Boy). La technologie de la fusion consiste quant à elle a pousser à la fusion des atomes plus petits tels l’hydrogène, déployant ainsi une puissance énergétique dévastatrice.

La communauté internationale a réagi immédiatement en condamnant le test qui, comme l’a déclaré le Premier Ministre japonais Shinzô Abe, « viole clairement les résolutions adoptées par le Conseil de Sécurité de l’ONU et représente un sérieux défi envers les efforts internationaux de non-prolifération nucléaire« . M. Abe a affirmé que cet essai était une grave menace pour la sécurité de la nation et que le Japon ne pouvait en aucun cas tolérer cela.

La ville de Hiroshima, ravagée par le bombardement américain du 6 août 1945, s’est depuis lors fortement mobilisée dans la lutte contre le nucléaire militaire, et ses maires successifs se sont attachés à envoyer lors de chaque nouvel essai une missive de protestation aux instigateurs. Suite aux évènements du 6 janvier dernier, une lettre signée par le maire actuel de la ville M. Kazumi Matsui a immédiatement été adressée à Kim Jong-un.

En substance, la lettre rappelle les efforts engagés par la ville de Hiroshima dans le sens de l’abolition des armes nucléaires d’ici 2020 et le durcissement de la position des dirigeants du monde entier contre la prolifération. Faisant écho au discours du Premier Ministre, M. Matsui y écrit que le test du 6 janvier représente une grave atteinte aux efforts internationaux en faveur du désarmement et de la non-prolifération des armes atomiques. Il ajoute que cet évènement porte atteinte à la mémoire des survivants du bombardement de Hiroshima, et demande à la Corée du Nord de renoncer immédiatement a tout son arsenal et à tous ses projets en matière de nucléaire militaire et d’engager le dialogue diplomatique dans cette direction avec la communauté internationale.

Tir badger de l'opération Upshot-Knothole, nom donné à une série de onze essais nucléaires atmosphériques complétée au site d'essais du Nevada de mars à juin 1953 aux États-Unis.
Tir badger de l’opération Upshot-Knothole, nom donné à une série de onze essais nucléaires atmosphériques complétée au site d’essais du Nevada de mars à juin 1953 aux États-Unis.

Au niveau de la préfecture de Hiroshima également, une lettre de protestation a été envoyée au chef de la Corée du Nord. Elle rappelle notamment la résolution en faveur de l’abolition des armes nucléaires adoptée par 166 pays membres de l’Assemblée Générale des Nations Unies en 2015 à l’occasion du 70e anniversaire du bombardement, et appelle le pays à réintégrer le Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires duquel il s’était retiré en 2003.

Du côté de la société civile locale aussi la mobilisation s’est immédiatement organisée. Une manifestation assise rassemblant environ 150 personnes, dont des survivants victimes du bombardement très âgés, s’est tenue malgré le froid au sein du Parc du Mémorial de la Paix de Hiroshima le 7 janvier. Outre des survivants, étaient réunis des membres de plusieurs associations dont le but est de transmettre la mémoire des victimes de la bombe. Les manifestants, qui se sont mobilisés lors de chacun des essais nord-coréens en 2006, 2009 et 2013 ont qualifié d’impardonnable ce geste qui vient piétiner leur souhait d’abolition des armes nucléaires et leur désir d’une paix durable.

Les différents groupes et associations de survivants sont nombreux et actifs à Hiroshima. Immédiatement après la détection de la secousse, alors que le Japon s’attendait à de nouveaux essais par Pyongyang, différents représentants de ces groupes ont exprimé leur indignation, déclarant qu’une telle action allait à l’encontre de la tendance actuelle de mobilisation à travers le monde entier pour l’interdiction des armes nucléaires. Selon l’un d’entre eux, ces tests sont préliminaires à une utilisation réelle en situation de guerre, et sont, à ce titre, inacceptables. Tout dialogue étant impossible, les associations déplorent de ne pouvoir déployer leurs efforts de sensibilisation auprès du gouvernement et de la population nord-coréenne.

Le réseau des Maires pour la Paix lancé en 1982 par le maire de Hiroshima alors en fonction est une des initiatives de la ville de Hiroshima à l’encontre du nucléaire militaire. Ce réseau cherche à regrouper les administrations locales à travers le monde avec l’objectif de sensibiliser le public à la nécessité d’abolir les armes atomiques. Plus largement, le réseau s’est donné pour mission de chercher à remédier à tous les obstacles à la paix mondiale tels que la famine et la pauvreté, apporter une aide aux réfugiés de guerre, promouvoir les droits humains et protéger l’environnement. Au 1er février 2016, 6 991 villes dont 1 613 villes japonaises étaient membres du réseau.

Renaud Albert – sources : The Asahi Shimbun, CNN, BBC, Vox, Ville de Hiroshima, Préfecture de Hiroshima, Mayors for Peace

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