Yamato au Casino de Paris.
L’âge vénérable du tambour taiko, né dans le Japon médiéval, lui confère des couleurs de mythe. Il a fréquenté les temples anciens, les cérémonies de l’Empire divin, les villages animistes. La troupe Yamato, qui vient pour la première fois en France après avoir déjà conquis presque toute l’Europe, pose sur scène ces tambours au ton mat et à la taille, facture et forme variées.
Beaucoup de Français se souviennent des visites régulières que nous fit longtemps la troupe Kodo, avec ses gestuelles « calligraphiées » et ses mises en scène cérémonieuses. Pour résumer, disons que Kodo était le Japon de Hokusai et de Mishima, redessinant avec délectation sa tradition, et que Yamato pourrait incarner le Japon de Naruto et de la J-pop un Japon devenu plus hédoniste sans pour autant brader sa mémoire, et surtout un Japon incapable d’autarcie. Car on ne peut aujourd’hui, quel que soit le tambour que l’on frappe, ignorer les tournées mondiales du spectacle Stomp, les tambours royaux du Burundi ou les Français des Tambours du Bronx, les tambourinaires de Doudou N’Diaye Rose et la samba percussionniste d’Olodum. La furieuse énergie des jeunes gens de Yamato n’est pas seulement l’héritière de vieux rituels : avec leurs chaussures de sport manufacturées, leurs coiffures en palmier ou en hérisson, leur science de la scène, ils appartiennent à ce monde grand ouvert dans lequel percussions traditionnelles et show-business international parlent la même langue.
Nulle monotonie, donc, dans ce spectacle de tambours, qui alterne tableaux hiératiques de dix musiciens et tours de forces en petite formation, interventions d’instruments traditionnels (comme des shamisens brandis à la façon de guitares électriques) et duels qui font penser aux drum battles de Gene Krupa et Buddy Rich dans les années 1930. Sous le dépaysement, le spectateur européen est curieusement en terrain de connaissance. L’enjouement, la puissance, la fougue, le plaisir des athlétiques garçons et filles de Yamato font le reste. On en sort énergisé. Casino de Paris, jusqu’au 24 janvier.Tél. : 08 926 98 926 et www.casinodeparis.fr
LeFigaro