Moins seyante qu’une chemise hawaïenne, moins sexy qu’un bikini, la « veste climatisée » est pourtant l’un des vêtements de l’été au Japon où la population tente de se rafraîchir sans consommer trop d’énergie.
Depuis l’accident nucléaire de Fukushima, l’archipel est privé de la majorité de ses réacteurs et les autorités de la région de Tokyo et du Tohoku (nord-est) ont donné l’ordre aux entreprises de réduire jusqu’à 15% leur consommation d’électricité pour éviter des coupures de courant.
Extinction de lumières et équipements, avancée des horaires de bureau, les firmes s’adaptent comme elles le peuvent à cette restriction… et certaines ont trouvé la solution en vêtant leurs ouvriers de cet habit original, qui remplace avantageusement les meilleurs climatiseurs.
« Il est inutile de refroidir une pièce entière, l’important est que les gens se sentent au frais », explique Hiroshi Ichigaya, inventeur du vêtement et créateur en 2004 de Kuchofuku, le fabriquant basé à Toda (nord de la capitale).
A l’époque, cet ancien ingénieur de chez Sony cherchait un système de climatisation économe en électricité. Il a placé dans un blouson deux petits ventilateurs qui pompent l’air extérieur, le font circuler à l’intérieur du blouson puis ressortir: la chemise dégoulinante de sueur est séchée, le corps rafraîchi.
La « veste climatisée » est alimentée par une batterie lithium-ion assurant onze heures d’autonomie aux petites hélices, que l’utilisateur peut couper et remettre en marche à tout moment.
« Je travaille dans des endroits surchauffés où je dois porter des manches très longues, aussi ce vêtement va-t-il m’éviter les coups de chaleur », souligne Ryo Igarashi, un récent acquéreur de la tunique, qui oeuvre, ironie du sort, sur des chantiers d’installation d’air conditionné.
Pour M. Ichigaya, mieux vaut porter un vêtement supplémentaire climatisé qu’enlever veste et cravate comme l’incite la campagne nationale « Super Cool Biz », destinée à limiter l’usage de l’air conditionné au travail en période de tension sur le réseau électrique.
Au Japon, bureaux, usines, trains, maisons, tout est habituellement climatisé durant l’été, souvent torride, ce qui fait des mois de juillet, août et septembre des périodes de pic de consommation.
Kuchofuku façonne aussi des coussins et des matelas utilisant le même système de ventilation, mais son produit vedette reste la veste. Vendu 11.000 yens (95 euros), cet habit, prisé dans l’industrie automobile, la sidérurgie et la construction, s’est récemment trouvé une nouvelle clientèle auprès d’employés de bureau et de femmes au foyer.
Les commandes ont nettement augmenté depuis la catastrophe du 11 mars: l’entreprise devrait vendre 40.000 blousons cette année, deux fois plus que l’an passé, et pourrait facilement en écouler 80.000 si elle disposait des moyens logistiques nécessaires, assure M. Ichigaya.
Pour les mêmes raisons, le dirigeant affirme avoir dû refuser dernièrement, la mort dans l’âme, une commande de 500.000 vêtements demandés par l’Etat nippon.