Geisha, samouraï, ninja… : le Japon possède un certain nombre de figures emblématiques qui fascinent l’Occident tout en restant en partie méconnues. On s’arrête trop souvent à un agrégat de clichés, sans replacer ces symboles de la culture nippone dans leur contexte sociologique et historique. Le crépuscule des samouraïs, de Julien Peltier, publié chez Economica et préfacé par Danielle Elissef, tente justement de nous entraîner au-delà des clichés concernant les fameux guerriers, en offrant une synthèse très accessible de nombreux travaux d’historiens français et étrangers.
Si Julien Peltier consacre l’essentiel de son ouvrage à l’époque Sengoku et à l’unification du Japon, il remonte aussi à l’origine de cette aristocratie militaire et au temps où les samouraïs étaient avant tout des archers à cheval. Les chapitres consacrés à la guerre des Genpei, aux invasions mongoles, à la tentative de restauration impériale de l’empereur Go-Daigo et à l’établissement de la dynastie Ashikaga octroient une vue d’ensemble de l’histoire politique et militaire qui précède plus d’un siècle de guerres civiles et l’ascension des trois hommes qui ont fait du Japon un pays unifié, Oda Nobunaga, Toyotomi Hideyoshi et Tokugawa Ieyasu. Le récit des principales batailles, précis mais vivant, permet de mieux comprendre le génie militaire des grands noms que sont Takeda Shingen, Uesugi Kenshin, Kusunoki Masahige, et bien d’autres.
L’auteur s’attache à démythifier le samouraï, montrant que l’on peut faire une fort belle carrière en trahissant ses alliés et en changeant plusieurs fois de camp (comme le shôgun Ashikaga Takauji), ou encore que la cruauté la plus éhontée n’a pas toujours été contraire au code de l’honneur. En analysant les personnalités de Miyamoto Musashi et de Yagyû Munenori (début de l’ère Tokugawa), Julien Peltier montre l’évolution de la figure du samouraï et et de son rôle social dans une société en paix. Du rônin cherchant à perfectionner son art au gestionnaire avisé et lettré, en passant par le disciple s’interrogeant sur la Voie, le samouraï de l’époque Edo n’a plus grand-chose à voir avec celui qui servait Nobunaga. C’est aussi à cette époque que se cristallise la réflexion théorique autour du samouraï et de ses valeurs (le Bushidô), lesquelles perdurent après la disparition définitive de cette caste de guerriers à l’ère Meiji.
Le crépuscule des samouraïs constitue donc une belle introduction à l’histoire du Japon et de ses guerriers emblématiques. Sa riche bibliographie permettra aux amateurs d’approfondir leurs connaissances et de poursuivre leur réflexion.