Faut-il croire aux fantômes japonais ?
Rétribution De Kiyoshi Kurosawa – Réincarnation De Takashi Shimizu – Kaidan De Hideo Nakata
En l’espace de quinze jours, à raison d’un titre chaque mercredi, l’anthologie « Jap’Horror » nous aura proposé de plonger dans un véritable phénomène culturel japonais : le film de fantômes ou, en nippon dans le texte, kaidan eiga. Trois films, donc, trois histoires différentes mises en scène par trois réalisateurs reconnus et produites par Takashige Ichise, l’homme à qui l’on doit deux des franchises les plus lucratives de la nouvelle vague du kaidan : Ring et The Grudge.
Rétribution, sorti en salles le 29 août, est signé Kiyoshi Kurosawa. Racontant le vacillement mental d’un flic au cours d’une enquête sur une étrange série de meurtres, le talentueux auteur-réalisateur, toujours à la recherche de l’image la plus déstabilisante possible, bâtit un vrai film de fantômes qui nous amène tout doucement (un peu trop, même) vers l’étonnant et triste retournement de situation final. Bref, de quoi reprendre confiance en Kurosawa, après son soporifique Loft. On ne peut pas en dire autant de Réincarnation (sorti le 5 septembre), pesant film d’auteur que l’on doit à Takashi Shimizu. Le réalisateur de l’interminable saga The Grudge donne ici dans le film pour cinéphiles distingués, avec cette histoire de tournage hanté par les fantômes du sombre fait divers qu’il est supposé reconstituer. Se reposant sur la mise en abyme inhérente à son intrigue (de quoi faire gamberger les étudiants en cinéma), Shimizu reste par ailleurs égal à lui-même, son unique parti pris de mise en scène consistant à se demander où placer le fantôme dans le cadre pour mieux surprendre le spectateur.
Heureusement, mercredi prochain, le sensible Hideo Nakata, réalisateur des célèbres Ring et Dark Water, vient clore le cycle sur une note beaucoup plus plaisante avec le bien nommé Kaidan, pur film de fantômes romantique dans le Japon du XIXe siècle, qui retourne aux sources littéraires du genre nippon en racontant une histoire d’amour marquée du sceau d’une terrible malédiction familiale. Beau, émouvant et particulièrement bien interprété, Kaidan arrive à rendre réellement prégnant « le » leitmotiv du kaidan eiga : la figure du fantôme comme allégorie d’un passé qui ne passe pas.
Source : Le Figaro.fr