Au Japon, travailler plus n’est généralement pas synonyme de revenus supplémentaires
Faut-il vivre pour travailler ou travailler pour vivre ? La question est pertinente au Japon où la vie professionnelle passe généralement avant la famille. Le temps de travail légal y est de 40 heures par semaine, mais les estimations sur le temps passé au travail varient.
Traditionnellement, les Japonais ne réclament pas une rémunération pour les heures supplémentaires : « La règle consiste à rester plus tard que son chef même si l’on n’a plus rien à faire. Et il est bien vu d’arriver aussi plus tôt ! », remarque un conseiller en ressources humaines à Tokyo.
La relation entre le salarié et son entreprise est très forte : la société forme sa recrue de zéro, le protège. Elle lui permet aussi d’exister, car sans travail, il n’y a pas de reconnaissance sociale. Junichiro Koizumi, alors premier ministre, avait d’ailleurs distingué les gagnants des perdants en ne se basant que sur des critères professionnels.
La productivité japonaise n’est pas la plus perfomante
Reste que ces champions de la vie en entreprise ne sont pas forcément les plus efficaces : la productivité du travail au Japon ne représente environ que 60 % de la productivité américaine.
Au risque de négliger l’éducation de ses enfants, un salarié ne peut pas refuser une soirée avec ses collègues. La question ne se pose d’ailleurs même pas : la vie de famille est ainsi faite. Plus qu’en France, les hommes travaillent, les femmes s’occupent de leur intérieur et des enfants.
L’hebdomadaire Shukan Bunshun s’est récemment intéressé à ces hommes qui choisissent de ne pas rentrer à la maison les soirs de semaine. Les raisons sont variées : temps passé dans les transports, surcharge horaire, stress, vie de famille difficile que l’éloignement apaise… Ces hommes, indique le magazine, dorment dans des capsules-hôtels, des bains publics, des karaokés et autres cafés Internet.
« Long de faire changer les choses »
Derrière la question du temps de travail se cache l’épineux problème de la natalité. « L’urgence démographique se retrouve dans toutes les difficultés du pays, martèle Hiroshi Ono, chercheur à la Texas A & M University. Tout le monde sait ce qu’il faut faire mais on ne constate aucun progrès. »
À la fin de l’année 2007, le gouvernement avait annoncé une série de mesures pour inciter les hommes à passer plus de temps en famille, « mais les habitudes et la pression sociale sont si fortes qu’il sera long de faire changer les choses », regrette-t-il.
La situation n’est pourtant pas figée : « L’État a dérégulé l’économie, ce qui laisse le choix aux entreprises de maintenir le fonctionnement traditionnel ou de changer leurs pratiques, remarque un chercheur français en sciences sociales. On observe donc une diversité accrue et l’on ne peut plus considérer le tissu des entreprises japonaises comme un tout homogène. »
La fin du modèle de l’emploi à vie est un des éléments qui pourrait conduire au changement progressif de la vie en entreprise : les jeunes employés japonais devront être moins dépendants de leur entreprise pour se former, les salariés pourront faire valoir leur mobilité professionnelle et devenir plus libre vis-à-vis de leur hiérarchie. Et se concentrer davantage sur leur vie de famille.
Gilles de LESDAIN, correspondant à Tokyo
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[…] ce qui engendre une baisse de compétitivité. La productivité des Japonais serait même inférieure de 60% à celles des Américains. Ceci serait notamment lié à une mauvaise planification des tâches, un […]