Le mot yakuza (やくざ ou ヤクザ, prononcé yakouza, yakuza ?) également connu sous le nom de gokudō (極道), désigne le membre d’un groupe du crime organisé au Japon, exclusivement masculin, ou par extension n’importe quel voyou japonais. Les yakuza sont représentés par quatre principaux syndicats, présents sur tout l’archipel, et possèdent également des ramifications dans la zone Pacifique, et même en Allemagne et aux États-Unis. Ils seraient plus de 87 000[1].
Dans la terminologie légale japonaise, les organisations de yakuza sont appelées Bōryokudan (暴力団), littéralement « groupe violent ». Les yakuza considèrent ce terme comme une insulte, car il s’applique à n’importe quel criminel violent. Dans la presse occidentale, on les identifie parfois à la « Mafia japonaise », par analogie avec d’autres groupes du crime organisé, comme la mafia sicilienne.
Origines et histoire des yakuza
Leur naissance : l’ère Edo
En dépit de leur notoriété au Japon moderne, l’origine précise des yakuza encore aujourd’hui sujet à controverse.
La première hypothèse historique possible serait qu’ils sont les descendants des Kabuki-mono ou Hatamoto-yakko, apparus dès le XVII. Il n’y a pas de lien immédiat avec le théâtre, mais le mot « Kabuki » signifie être extravagant, excentrique. D’où l’idée d’un personnage qui ne se plie pas à la règle et qui se manifeste. Le groupe des Kabuki-mono réunissaient l’ère Tokugawa environ 500 000 personnes, toutes serviteurs du Shogun en tant que hatamoto, et c’est pourquoi ils sont également connus comme hatamoto-yakko (les domestiques du shogoun). Mais la « Pax Tokugawa » les laissa sans travail, et de nombreux membres se convertirent au banditisme, pillant villes et villages à travers l’archipel. Ils prirent l’habitude de terroriser les populations, de semer le trouble, voire de tuer des citoyens pour le plaisir, d’où leur nom de « Kabuki-mono » (les « fou ») [2]. On les appelleraient également aujourd’hui des rônins.
On pouvait distinguer les Kabuki-mono par leur mode d’habillement particulier, leurs coupes de cheveux, la longue épée qu’ils portaient et leur mauvais comportement général.
Il n’existe néanmoins, aucune preuve tangible que le groupe Hatamoto-Yakko soit bien l’ancêtre des yakuza. Les yakuza eux mêmes défendent une autre hypothèse : ils affirment descendre des Machi-Yokko (« les serviteurs des villes »). Dans le courant du XVe siècle, les ancêtres des yakuza se seraient ainsi rassemblés pour créer des associations de défense pour se protéger des « Kabuki-mono » et de leurs divers méfaits. Ils vont ainsi devenir des Machi-yako, que l’on pourrait présenter comme étant des défenseurs des opprimés. Ce groupe va peu à peu se diviser en deux castes distinctes :
les Bakuto (joueurs professionnels) qui travaillaient dans les villes, et contrôlaient le monde des jeux de hasard, très en vogue à l’époque (c’est encore aujourd’hui une des activités les plus lucratives des yakuza) les Tekiya (porteurs et camelots) qui travaillaient sur les routes. À l’origine, le recrutement des membres de ces deux groupes se faisait dans les mêmes milieux (paysans sans terres, voyous). Chaque groupe une fois constitué, s’attachait un territoire fixe et restreint. Comme la mafia italienne, les yakuza sont organisées en familles selon une hiérarchie très stricte. Toutefois, cette hiérarchie est accentuée par le système de oyabun-kobun (litt. père-enfant), l’Oyabun fournissant conseils, protection et secours contre loyauté et services du Kobun.
Dès 1603, certains rônins, samouraïs en rupture de ban mis au chômage par la « Pax Tokugawa » qui durera 250 ans, rejoignent ces deux groupes. Néanmoins, bien que se proclamant défenseurs de la veuve et de l’orphelin, ils ne défendent la plupart du temps que leurs propres intérêts, et vivent de brigandages.
D’après le chroniqueur du magazine français Historia et enseignant au Japon Christian Kessler, c’est véritablement au début du dix-huitième siècle que voient le jour, dans les grands centres urbains d’Osaka et d’Edo (ancien nom de la ville de Tokyo), les organisations yakuza sous la houlette de chefs de bande.
Les groupes yakuza sont également constitués de hinin (non-humains) et de eta (pleins de souillure) qui, dans la hiérarchie sociale, sont derrière les samouraïs, les artisans et les marchands. Les hinin regroupent les gens du spectacle, les gardiens de prison, les bourreaux, etc. ; quant aux eta, ils sont essentiellement constitués par ceux dont le métier est lié à l’abattage d’animaux. D’ailleurs, l’origine de leur discrimination se trouve sans doute dans la religion shintô et dans le bouddhisme qui considèrent comme une souillure toute occupation liée à la mort et au sang. Bien que « libérés » en 1871 lors de la restauration de Meiji, ces burakumin (littéralement gens du hameau) ont toujours souffert de multiples discriminations de caste, principalement à l’emploi et au mariage. Cet état de fait perdure encore de nos jours et contribue encore à fournir les rangs des yakuza. Les burakumin représente 70% en effet des membres du Yamaguchi-gumi, le plus grand clan yakuza[3].
De l’époque Meiji à 1945
Le statut et les activités des yakuza vont progressivement évoluer, en parallèle des bouleversements politiques et de la structure japonaise. L’entrée dans l’ère moderne, avec l’ère Meiji (1868) va symboliser le renouveau des yakuza, qui vont étendre leur pouvoir sur toute la société. Ils vont profiter du changement de politique pour tisser des liens avec le gouvernement et intensifier les activités des Tekiya, grâce à des couvertures légales (autorisées par les liens tissés avec le gouvernement en grande partie) qui leur assurent une totale légalité de la partie émergée de leurs activités. De plus, la pratique de recrutement va s’intensifier grandement, fournissant aux organisations de plus en plus de main d’œuvre permettant d’étendre leurs pouvoirs. Du fait de l’importance grandissante des Tekiya, les trafics s’intensifient, on assiste au développement du marché noir et du commerce du sexe.
À la fin du XIXe siècle et au début du XXe siècle, les liens entre yakuza et politique vont encore s’accentuer, poussés par l’ouverture du pays vers l’Occident. Les yakuza demeurant très attachés aux traditions, vont refuser tous contacts et actions bienveillantes à l’égard des Européens et des Américains. Ils organisent des actes terroristes visant des personnages politiques favorables à une ouverture du pays, deux premiers ministres et deux ministres des finances, entre autres, seront ainsi assassinés.
Dans les années 1930, les yakuza bénéficient d’une grande liberté, grâce à leur rapprochement idéologique avec la droite ultranationaliste, très proche du pouvoir à l’époque.
De la fin de la Seconde Guerre mondiale à nos jours
Suite à la défaite lors de la Seconde Guerre mondiale, les mafias étrangères essayèrent de s’installer au Japon, notamment la pègre coréenne et taiwanaise, et tentèrent de prendre le contrôle des marchés noirs. On appela ses nouveaux arrivants les Daisangokujin. Ils agrandirent rapidement leur territoire, car les forces de police avaient été affaiblies suite à un purge effectuée par les forces d’occupation. Cette situation fut un tremplin décisif pour l’organisation yakuza. Avec l’assentiment du pouvoir, elle fut utilisée afin de lutter contre ces mafias, et également comme briseuse de grève. Elle a aussi profité du fleurissement du marché noir dans un Japon ravagé par la guerre et privé de tout. Le pouvoir des yakuza va donc se faire double : d’un côté ils bénéficient dans l’ombre de l’appui des hommes politiques et de la police, et sont en plus nécessaires à la société d’après guerre, le marché noir restant le seul moyen de survie pour la majorité des Japonais. La mafia japonaise devient donc un des piliers du Japon, avec l’assentiment des forces d’occupations, qui voyaient en elle une « force régulatrice ».
L’après-guerre voit également l’apparition d’une nouvelle criminalité, en parallèle de la pègre traditionnelle datant d’avant-guerre, et ayant encore une partie de ses traditions. Naissant en pleine crise sociale, le groupe des Gurentai (愚連隊) est constitué de membres plus jeunes, plus violents, c’est une criminalité moins organisée. Ils avaient pour spécialités le trafic d’amphétamines et la prostitution (qui n’a rien à voir avec les geisha), ou la pornographie. Ce groupe est progressivement absorbé par des gangs plus importants, pour finalement former les grands familles qui sont encore aujourd’hui en place, comme les Yamaguchi-gumi, ou les Inagawa-kai.
Entre 1958 et 1963, les yakuza accroissent leurs effectifs de 150% pour atteindre son apogée un total d’environ 184 000 yakuza, répartis dans 126 gangs. [4] L’organisation compte alors plus de membres que l’armée japonaise elle-même. Des clans se forment et des guerres éclatent basées sur le partage de territoire. Un homme du nom de Yoshio Kodama amènera la paix entre les gangs. C’est le « Al Capone » japonais, il souhaitait créer une alliance entre les différents gangs, pour n’en former qu’un seul et unique, tout puissant.
Cette situation est remise en cause à la fin des années 90 par le gouvernement japonais, qui fait voter une loi antigang le 1er mars 1992, et la loi antiblanchiment en 1993, ayant pour but de faire disparaître les syndicats du crime. Le nombre des yakuza a fortement diminué, mais sans pour autant disparaître. Les effectifs sont aujourd’hui estimé à 87 000 membres.
Origine du nom
Bien que l’origine des organisations remonte probablement au XVe siècle, l’origine du mot « yakuza » est plus récente. Elle est tiré d’une combinaison perdante du jeu de cartes japonais appelé Oicho-Kabu, proche du Baccara, qui est traditionnellement joué avec des cartes de kabufuda. À la fin d’une partie, les valeurs des cartes sont additionnées et l’unité de la somme représente le score du joueur. Le but du jeu est de s’approcher le plus de 19.
« ya » vient de yattsu, qui signifie huit (peut également se dire hachi), « ku » veut dire neuf (le mot kyu est aussi utilisé), « za » est sans doute une déformation de « san » qui veut dire trois. Ya-Ku-Sa est une somme de 9-8-3, soit 20 (donc le score est de 0) qui est une main perdante. Ce nom signifie donc « perdants ». Les Yakuzas sont à l’origine issus des plus pauvres, des exclus de la société.
Une autre origine est parfois évoquée : Les policiers devaient entrer parfois dans des temples pour y débusquer des joueurs, mais non sans hésitation, car les sanctuaires shintoïstes sont sacrés. Sur une chaise, à l’entrée, un guetteur guettait. Le « rôle » (« yaku ») de la chaise (« za ») était donc d’être un rempart entre police et joueurs
La « voie chevaleresque »
L’intégration de Rônin au XVe siècle a apporté un certain nombres de règles aux yakuza, à l’image du Bushidô chez les Samouraïs. Cette ligne de conduite, le Ninkyôdô (la voie chevaleresque), contient 9 règles :
Tu n’offenseras pas les bons citoyens. Tu ne prendras pas la femme du voisin Tu ne voleras pas l’organisation Tu ne te drogueras pas Tu devras obéissance à ton supérieur Tu accepteras de mourir pour le père ou de faire de la prison pour lui Tu ne devras parler du groupe à quiconque En prison tu ne diras rien Il n’est pas permis de tuer un katagari (personne ne faisant pas partie de la pègre) On notera que la règle 9 n’est pas souvent appliquée, et que peu de clans suivent encore cette éthique, et les traditions en général.
Organisation et composition interne
Les yakuza ont une structure semblable à celle de la mafia sicilienne, organisé en familles (ikka). Ils ont adopté la structure hiérarchique traditionnelle de la société japonaise, pyramidale, mais aussi familiale, bien que les membres ne soient pas liés par le sang. Chaque « famille » possède un patriarche, l’Oyabun (組長, littéralement « le père », l’équivalent du parrain), aussi appelé Kumichō (組長, tête de famille). Chaque homme accepté chez les yakuza doit accepter ce rapport Oyabun/Kobun, en promettant la fidélité inconditionnelle et l’obéissance à son patron. L’Oyabun, en temps que bon père, est obligé de fournir la protection et les bons conseils à ses enfants. Chacun des deux protagonistes respecte le code du « jingi » (仁義, justice et devoir). Chaque kobun peut à son tour devenir « parrain » quand il le souhaite, tout en gardant son affiliation avec son propre oyabun, et ainsi agrandir l’organisation mère. Le plus proche conseiller de l’oyabun est le Saïko-komon (最高顧問), c’est un poste administratif qui s’occupe de l’état-major (avocats, comptables, etc.). Le saikō-komon dirige ses propres secteurs. Il commande ses propres subordonnés, y compris des conseillers, comptables ou avocats. Juste en dessous se trouve le Waka-gashira, c’est le numéro deux de la « famille », il est sous les ordres directs de l’Oyabun. Son « petit frère », le Shatei-gashira, est de même rang, mais inférieur en autorité. Il est un relais entre les rangs inférieurs et le numéro deux du clan. Les rangs intermédiaires sont composés des Kyodaï (les « grands frères »), et le bas de la hiérarchie par les Shateï (petits frères).
En dehors de la famille, le kumi-in (l’homme engagé) est un exécutant qui pourra peut-être intégré au clan s’il s’en montre digne.
Les yakuza d’aujourd’hui viennent de milieux très variés. Les récits les plus romanesques racontent que les yakuza recueillent les fils abandonnés ou chassés par leurs parents. Ils sont souvent recrutés par un clan dès le lycée, une majorité dans les communautés burakumin et coréenne, peut être à cause de la véritable ségrégation raciale dont elles sont victimes au Japon. Les burakumin représente 70% des membres du Yamaguchi-gumi. La pègre ne se cantonne donc pas qu’aux seuls japonais pour recruter des hommes, elle accepte toutes des origines, ne se fiant qu’aux compétences des individus. En effet, les yakuza se composent habituellement d’hommes très pointus, adroits, intelligents, car le processus pour obtenir un poste dans l’organisation, est très concurrentiel et darwinien. Le milieu japonais est entièrement constitué d’hommes, et il n’y a habituellement aucune femme impliquée, excepté l’épouse de l’Oyabun qui s’appelle le « Kami-san ». Quand le chef du Yamaguchi-gumi a été abattu vers la fin des années 90, son épouse lui a succédé pendant une courte période.
Les rituels
Pour être admis dans un clan, il faut faire ses preuves, par contre la nationalité n’a aucune importance, il faut juste prouver son attachement aux traditions et à la famille.
Comme dans la plupart des organisations de la pègre, les yakuza ont mis au point une cérémonie d’admission des nouvelles recrues. Ce rituel d’entrée est très cérémonieux : il s’agit d’une réception dont la date est fixée en accord avec le calendrier lunaire. Tous les participants sont vêtus de kimono, et placés suivant un ordre établi, dans le silence le plus complet. La cérémonie se passe dans une salle traditionnelle, où sont entreposés un autel shintoïste et une table basse avec des cadeaux. L’Oyabun et le futur membre sont agenouillés l’un à coté de l’autre en face de témoins (Azukarinin), et préparent du sake mélangé à du sel et des écailles de poisson, puis ils versent le liquide dans des coupes. Celle de l’Oyabun est remplie entièrement, afin de respecter son statut. Le saké symbolise ici les liens du sang. Ils boivent ensuite une gorgée, s’échangent leurs coupes, et boivent à nouveau. Le nouveau Kobun scelle de cette manière son appartenance à la famille et à son Oyabun, il garde sa coupe (nommée Oyako Sakazuki), elle est le symbole de sa fidélité. Si un yakuza rend son Oyako Sakazuki à son chef, il rompt ses liens avec sa famille. Par la suite, l’Oyabun fait un discours rappelant les principes des yakuza, la fidélité et l’obéissance aveugle. Le rituel se clot par la rupture du silence, où tous les participants crient en cœur « Omedo Gozaimasu ».
Il existe une autre cérémonie, plus simple : la cérémonie de départ, ou de licenciement (« Yubitsume », 指詰め ),. Si un yakuza enfreint le code d’honneur, il doit, pour se faire pardonner, se mutiler lui-même le petit doigt et l’offrir à l’Oyabun, et lui rendre la coupe de saké qu’il avait reçu lors du rituel d’entrée. Si il renouvelle sa faute, il doit recommencer la cérémonie avec les autres doigts. Cette punition, issue de la tradition des Bakuto, n’est pas rare, et peu de yakuza atteignent un âge avancé avec tous leurs doigts. Ils gardent le plus souvent leurs doigts mutilés dans le formol, pour se rappeler leur disgrâce. Néanmoins, cette pratique se raréfie, par souci de discrétion face aux autorités.
Une autre forme de pénitence, plus radicale est le Seppuku (plus connu sous le nom de hara-kiri) suicide rituel par éventration. Populaire chez les samouraïs et soldats japonais qui le pratiquaient comme pénitence pour leurs fautes, les yakuza sont connus pour le pratiquer également, en cas de faute extrême.
Les trois rituels sont importants au sein de la communauté, mais le plus pratiqué, reste le rituel du tatouage, plus connu sous le nom d’ »irezumi » au Japon. Sa mise en place est très douloureuse, car elle se fait encore de manière traditionnelle, l’encre est insérée sous la peau à l’aide d’outils non électriques, des faisceaux d’aiguilles fixés sur un manche en bambou ou plus récemment en acier inoxydable ( donc stérilisable ), fabriqués à la main. Le procédé est onéreux et douloureux, et peux prendre des années pour être accompli dans son intégralité.
Les yakuza en sont presque tous recouverts, et chaque clan possède son tatouage particulier. Cette pratique est originaire des Bakutos, dont les membres se tatouaient un cercle noir autour de leurs bras à chaque crime commis. C’est aujourd’hui plus la résultante d’une volonté des clans de se différencier, et une preuve de courage et de fidélité envers leur « famille », car le procédé est irréversible. Certains tatouages sur l’intégralité du corps peuvent demander des mois, voir des années de travail.
Les activités lucratives des yakuza
Une grande partie des activités actuelles des yakuza peut être reliée à leur origine féodale. Contrairement à la mafia italienne et aux triades chinoises, ce n’est pas une organisation secrète, les yakuza possèdent donc souvent un bureau bien visible, arborant le nom de leur clan ou leur emblème. Ces bureaux sont, légalement, des associations (dantai) le plus souvent vouées à « la poursuite de la voie chevaleresque » (Ninkyôdô). Les membres ont un code vestimentaire bien spécifique (lunettes de soleil et costumes colorés), de façon à être facilement identifiables par les civils (katagi). Même la manière de marcher des yakuza est différente de celle des citoyens ordinaires, plus ample et « arrogante ».
Au contraire, ils peuvent être plus conventionnellement habillés, mais quand le besoin se fait sentir, ils peuvent mettre en valeur leurs tatouages, afin d’indiquer leur affiliation. Occasionnellement ils déambulent également avec des insignes sur leurs revers. Une famille yakuza a même imprimé un bulletin mensuel avec des détails sur les prisons, les mariages, les enterrements, les meurtres, et quelques poésies de leurs chefs.
Jusqu’à récemment, la majorité des revenus des proviennent de dîmes, prélevées sur les commerçants et les entreprises situées sur leur territoire. En échange de la protection et de la bienveillance des yakuza, ils versent une sorte « d’impôt féodal ». Plus de 41% des patrons de grandes entreprises japonaises affirment avoir été victimes de ce racket. Cette situation s’est maintenue, principalement à cause de l’hésitation des entreprises à aller demander l’aide de la police.
Les yakuza tirent également leur revenus grâce à une forme d’extorsion de fond typiquement japonaise, connue sous le nom de sōkaiya (総会屋). C’est une forme de racket, et de protection. Au lieu de harceler de petites entreprises, l’organisation vend ses services : elle se loue pour étouffer toute contestation dans les assemblées générales d’actionnaires. Pour cela, elle achète un petit nombre d’actions, obtenant ainsi le droit de siéger au conseil des actionnaires de la société. Les yakuza garantissent alors le wa, l’harmonie de l’assemblée, en effrayant l’actionnaire ordinaire par leur simple présence. Par exemple, en 1989, la banque Fuji, 3ème banque japonaise, a été dénoncée pour avoir utilisé ce système, reversant plus de 200 millions de yens à des yakuza. Un prêt destiné officiellement à « financer des cimetières privés », mais qui n’a jamais été remboursé.
Ils s’engagent également dans le chantage simple, obtenant des informations incriminantes ou embarrassantes sur les pratiques d’une compagnie, ou d’un de ses dirigeants. Une fois que les yakuza ont mis un pied dans l’entreprise et assurés leurs gains, ils travailleront pour eux, évitant à la compagnie que des scandales ne deviennent publics, et seront payés en retour avec des pots-de-vin. Dans certaines entreprises, ces pots-de-vin sont même inclus dans le budget annuel.
On dénombrait plus de 8 000 sôkaiya en 1982, jusqu’à ce qu’une loi soit votée contre eux. Aujourd’hui, leur nombre serait revenu à 1 500. Néanmoins, 80 % des entreprises qui ont un chiffre d’affaires supérieur à 1 000 milliards de yens admettent avoir encore des contacts avec eux, dont environ 40% leur verseraient encore des fonds, bien que cela soit considéré comme un délit.
La police japonaise est également peu disposée à interférer dans les problèmes internes de certaines communautés, comme dans les zones commerçantes, les écoles/universités, les quartiers d’activités nocturnes. Il ne fait aucun doute que, localement, des pactes tacites sont conclus entre police et yakuza [6], en vertu desquels les membres des clans échappent à toute arrestation dans les délits mineurs, comme ébriété sur la voie publique, petite bagarre ou casse légère. Dans ce sens, les yakuza sont encore considérés comme des organisations semi-légitimes. Par exemple, juste après le tremblement de terre de Kobe, le Yamaguchi-gumi, dont les sièges sociaux sont à Kobe, s’est mobilisé pour aider les victimes du désastre (en fournissant même un hélicoptère), et ceci a été largement rapporté par les médias, ce qui contraste avec l’intervention beaucoup plus lente du gouvernement japonais. Pour cette raison, beaucoup de yakuza estime que leur racket est une sorte d’impôt féodal légitime.
Les yakuza ont une influence forte dans la lutte professionnelle japonaise, le puroresu. Ils sont considérés comme étant des grands défenseurs de ce sport, ainsi que du MMA, mais leur intérêt reste en grande partie financier. Les lieux où se déroulent les combats de luttes (des arènes, des stades) leur appartiennent souvent, ils touchent ainsi un pourcentage sur les entrées. Il est courant que les lutteurs reçoivent des instructions spécifiques concernant le déroulement de leurs matchs, comme faire juste appel aux yakuza de la foule. Le pionnier de la lutte au Japon, Rikidozan, a été tué par un yakuza.
Les yakuza ont également des liens avec les marchés financiers et aux opérations immobilières, par l’intermédiaire des jiageya (地上げ屋). En effet, le droit immobilier japonais rend très difficile l’expulsion des locataires et les expropriations. Les jiageya sont des bandes spécialisées dans l’intimidation, qui revendent aux compagnies voulant effectuer des projets de développement beaucoup plus grands.
L’activité criminelle la plus lucrative des groupes violents reste néanmoins le trafic de drogue (des amphétamines, notamment), assurant 35 % de leurs revenus devant le racket, (20 %), le (17 %) et la prostitution (13 %). Ils organisent aussi l’offre de travailleurs journaliers pour la construction et les docks et gèrent des circuits d’immigration clandestine, qui les fournissent aussi en prostituées asiatiques.
Source : Wikipedia