Yushinori Kaneko est venu apprendre l’agriculture bio, à Angers, au début des années 1970. Puis il l’a introduite dans son pays : le Japon.
Petit, sec, vif, le visage buriné par le vent et le soleil, l’esprit inventif, Yushinori Kaneko pratique l’agriculture bio depuis trente-cinq ans. « J’ai fait un stage d’un mois à Angers pour m’initier à l’agriculture bio », raconte-t-il, assez fier d’annoncer qu’il connaît un peu la France. « Au début des années 1970, le gouvernement japonais avait encouragé la jachère et l’abandon de la culture du riz. Or, le riz est la base de l’alimentation des Japonais. J’ai alors pensé que si je produisais bio j’aurais l’assentiment de la population. »
À son tour, il a ouvert la voie à l’agriculture biologique au Japon et reçoit volontiers des stagiaires, dont six s’affairent aujourd’hui entre les parcelles, les serres et les trois petits poulaillers qui parsèment son exploitation. Actuellement, il est membre du Comité de promotion de l’agriculture biologique au Japon, mis en place par le gouvernement en 2006.
Sa ferme couvre trois hectares dont une moitié en champs et l’autre en rizières. Il exploite aussi quelques bois publics dont il tire de la nourriture pour ses trois vaches qui lui fournissent en retour du lait et de la fumure. Il produit du riz, du soja, du blé, soixante variétés de légumes dont une vingtaine en simultané. Il repique son riz, en juin, et le récolte en octobre. En novembre, il sème un blé qu’il moissonne en juin. Puis, à la mi-juillet, il met en place un soja qu’il récolte en novembre, derrière lequel il sème un colza qui lui sert d’engrais vert et dont il utilise l’huile pour faire tourner le moteur de son petit tracteur.
Vinaigre de bambou et coccinelle
Il n’use d’aucun pesticide chimique car il pratique la lutte intégrée et emploie, par exemple, des coccinelles contre les pucerons. Il produit aussi un vinaigre de bambou qui fait, semble-t-il, un bon pesticide, ainsi que de l’écorce de riz incinérée. Il récupère l’eau de pluie pour irriguer les serres à l’aide d’une petite pompe qui fonctionne à l’énergie solaire. Cette même énergie accélère la fermentation de sa petite unité de biogaz dont il récupère le digestat pour arroser un compost nourri en grande partie de feuilles qu’il va chercher dans les collines avoisinantes.
« Je vends mes produits en direct à quarante familles », poursuit-il. Dix d’entre elles lui prennent de tout : riz, oeufs, légumes, lait… Les trente autres lui achètent surtout des légumes et des oeufs. Il livre la moitié de ses clients à domicile, l’autre moitié vient se fournir à la ferme. Il approvisionne aussi en légumes une école privée de Tokyo dont les élèves sont uniquement nourris en produits bio.
Jean LE DOUAR.
Source : www.ouest-france.fr