Les ostréiculteurs français, dont la production a été sauvée à deux reprises dans les quarante dernières années grâce aux huîtres nippones, ont décidé de venir en aide à leur tour à leurs collègues du nord-est du Japon qui ont tout perdu dans le tsunami du 11 mars.
Une première cargaison de sept tonnes de bouées, de cordages et de vêtements de pêche, expédiée de Charente-Maritime et du Finistère, est arrivée hier à l’aéroport international Narita, près de Tokyo, et va être acheminée par la route jusqu’à la région de Sanriku, sur la côte Pacifique. «C’est une véritable course contre la montre car le captage de naissains (embryons d’huîtres, NDLR) doit être terminé avant le 15juillet», a expliqué ArnaudRastoul, directeur de la société SDV, chargé de la logistique. Le captage consiste à fournir un support solide aux embryons – ou larves – pour qu’elles s’y fixent. Des coquilles Saint-Jacques, par exemple, sont accrochées aux cordages, qui sont reliés à une bouée et posés verticalement dans la mer, afin que les naissains s’y fixent. Le cycle d’une huître dure trois ans.
Échange de bons procédés
L’opération a été baptisée «France o-kaeshi» (France cadeau en retour), en souvenir de l’aide apportée par les ostréiculteurs nippons aux fermes françaises touchées par une épizootie en1970 et1990, a souligné Robert Verdier, président de l’ONG PlaNet Finance Japan, chargée de coordonner le projet. «Au Japon, si vous recevez un cadeau, il est de tradition de rendre la pareille. Aujourd’hui, c’est donc au tour des Français de venir au secours de leurs collègues nippons», explique M.Verdier. «Après le passage dévastateur du tsunami du 11mars, les ostréiculteurs et les pêcheurs du nord-est du Japon ont tout perdu, les parcs à huîtres, les bateaux, les maisons, le matériel de manutention. Il faut tout reconstruire». En France, l’initiateur de l’opération «France o-kaeshi» est Patrice Mulot, président de Mulot SAS, premier fabricant mondial de matériel pour l’ostréiculture. Au Japon, c’est la société Sanriku Oysters, présidée par Hiroaki Saito, qui est chargée d’identifier les besoins des ostréiculteurs et d’assurer la distribution du matériel. La première cargaison, arrivée hier, est destinée aux ports de Kesennuma et Miyako. Une deuxième cargaison de plus de 3,6 tonnes est attendue d’ici dimanche, a indiqué la société SDV. «Mais nous ne sommes qu’au début du programme de reconstruction de la filière qui prendra plusieurs années», avertit M.Verdier.
«Le conservatoire mondial de l’huître»
Le succès de l’opération est d’autant plus vital que la région du Sanriku est considérée comme «le conservatoire mondial de l’huître». «80% des naissains au Japon viennent de Sanriku et à chaque fois qu’un pays souffre d’une épizootie, il fait appel à cette région pour sauver son cheptel». «La France en sait quelque chose. D’ailleurs, pour faire face à une nouvelle épizootie apparue en 2009, elle devait passer commande de naissains au Sanriku… le 15mars dernier. Aujourd’hui, le cours de l’Histoire s’est inversé».