Le 8 août 2016, lors d’une allocution télévisée, l’empereur Akihito exprima à la nation son souhait d’abdiquer. « Lorsque je considère que ma condition physique diminue progressivement, je crains qu’il ne soit difficile pour moi de remplir mes fonctions de symbole de l’État avec tout mon être comme je l’ai fait jusqu’à présent », déclara-t-il.
Parmi les 125 empereurs japonais qui se sont succédé depuis le VIIe siècle, aucun ne dépassa la barre des 70 ans. Exception faite d’Akihito. À 83 ans, il assume quelque 1 700 missions chaque année. Parmi elles, des actes d’État, obligatoires, tels que la signature de documents. Mais l’empereur a également choisi d’effectuer de nombreux actes officiels, comme la réception de chefs d’États étrangers ou la visite de centres d’évacuation suite à des catastrophes naturelles.
« Ces actes officiels permettent d’obtenir un soutien du peuple de manière à maintenir le système impérial », explique Hideya Kawanishi, maître de conférences à l’Université de Kôbe. « Akihito semble avoir aussi conscience du rôle historique de l’empereur, qui consiste à partager les joies et les peines du peuple », ajoute-t-il.
Le tennô, ne se sentant aujourd’hui plus en mesure d’assumer ces nombreuses tâches, désire se retirer. Or si près de la moitié des monarques japonais ont, dans le passé, cédé leur place à un héritier, la législation actuelle n’autorise pas l’abdication. Des discussions ne tardèrent pas à s’engager, et une commission fut chargée par le gouvernement d’étudier la question.
Abdication : un problème, deux solutions
Deux options se présentèrent. La première est une révision du code de la maison impériale, donnant à la possibilité d’abdiquer un caractère permanent. Une solution, non seulement préférée par 76,6 % de la population selon une enquête réalisée en août 2016 par l’agence Kyôdô, mais aussi suggérée par le monarque. « On peut comprendre, à travers son discours du 8 août dernier, qu’il souhaite à la fois se retirer lui même et qu’on institutionnalise l’abdication», explique Akinori Takamori, historien et chargé de cours à l’Université Kokugakuin.
La seconde hypothèse est une loi spéciale permettant à l’empereur Akihito, seul, de se retirer. En mars dernier, le Parlement japonais fit part de sa préférence pour cette solution, également soutenue par le Premier ministre Shinzô Abe. Plusieurs raisons sont avancées, notamment le temps que prendrait une révision.
« L’empereur actuel est âgé et si on s’attarde il pourrait mourir avant la décision »
Hideya Kawanishi.
« Le gouvernement, qui pourrait être critiqué par les citoyens pour n’avoir pas agi rapidement, souhaite donc régler cette question au plus vite », poursuit-il.
D’après certains analystes, la refonte du code freinerait par ailleurs la révision de la Constitution, en bonne place dans l’agenda politique de Shinzô Abe. « Si le gouvernement penche pour cette loi spéciale, c’est aussi parce qu’il craint qu’un empereur puisse facilement se retirer, comme le ferait un citoyen ordinaire lors de sa retraite, aboutissant à une perte de prestige », avance Hideya Kawanishi. « Et puisque le Parti Libéral Démocrate est en train de préparer une révision de la Constitution qui vise à renforcer le prestige de l’empereur, [une modification du code] pourrait être considérée comme une contradiction », ajoute-t-il.